C’est parti pour 4 jours de marche entre Antigua et le lac Atitlan. Ça n’a l’air de rien comme ça, sur le papier, mais c’est une randonnée vraiment exigeante physiquement. La topographie de la région est raide : quand ça monte, ça monte… et du coup logiquement, quand ça descend, ça descend !! C’est dur pour les mollets et les genoux.

En minibus, nous mettons le cap sur San Andrès Itzapa situé à environ 1850 m d’altitude. Notre premier arrêt est consacré à la visite du Temple dédié à San Simon ou Maximon (prononcer Machimon) un symbole du syncrétisme guatémaltèque entre croyances maya et religion catholique. Selon les régions, Maximon est un grand père ou un grand frère auprès de qui on vient solliciter assistance et bénédiction pour une grande diversité de situations : guérir d’une maladie, susciter l’amour, réussir dans les affaires, émigrer aux Etats Unis, acheter une voiture… Pour cela, les fidèles viennent de loin, parfois des pays voisins, pour réaliser un rite d’offrandes aussi diverses que des cigarettes, du rhum, de la nourriture, des fleurs et des bougies. L’ensemble est disposé savamment en cercle avant d’être brûlé parfois au son de la musique d’un groupe de Mariachis. C’est assez impressionnant !



A l’intérieur du temple, les murs sont couverts d’ex-voto en remerciement des grâces concédées par cet « Hermano ».
Le chauffeur nous dépose ensuite sur les hauteurs après le petit village de Chicasanga. C’est le début de notre marche ! La petite route se transforme progressivement en piste, puis en sentier, hésitant entre champs de choux et forêt dense. Nous nous élevons petit à petit accompagnées par un paysan en route vers sa parcelle qui tient à partager avec nous son histoire de clandestin aux Etats Unis pendant plusieurs dizaines d’année. Il a 45 ans, il en paraît 60 !

Notre pause déjeuner, préparée si gentiment par Mario notre guide, nous offre un panorama sur le moutonnement des collines couvertes de forêt humide. Beaucoup de fleurs, d’oiseaux… ce qui dépayse c’est le foisonnement et l’infinité de nuances de vert.

Nous entrons dans la « forêt de nuages », la brume monte (ou descend ?!), et donne au paysage une drôle d’allure fantomatique. Le chemin est encore long jusqu’au camp et la descente est raide. Pas fâchée d’arriver enfin sur le terrain de foot où Juan Carlos (el jefe) et Patricio (le chef… cuisinier) ont installé le camp (juste à côté du cimetière et, plus dérangeant, d’une route assez passante).

Le glamping est une première pour moi !!! A vrai dire, ce n’est pas désagréable ! Tente avec grand lit gonflable, douche chaude, toilette, tente salle à manger avec table (et même un bouquet de fleurs), coin feu avec des transats… C’est vraiment du luxe. La journée se termine avec des « s’more » : une drôle de spécialité nord-américaine qui consiste à faire des sandwichs avec des marshmallow fondus et du chocolat entre deux biscuits genre petits-beurre… très très régressif !
La deuxième journée commence par une grande descente. Nous traversons une communauté et croisons des travailleurs qui rejoignent les champs de choux ou les plantations de café. Les enfants sont encore en grandes vacances car le calendrier scolaire est organisé en fonction de la saison de récolte du café qui s’étend de décembre à février.

La pente prend des allures de ravin, la température augmente de quelques degrés. Nous croisons une (jeune) femme chargée d’un gros ballot de buchettes de bois en haut duquel est juchée une toute petite fille, elle tient par la main un petit garçon. A bien des égards, la vie rurale guatémaltèque rappelle le Maroc. Autre latitude, même rudesse du travail aux champs, même âpreté du quotidien, même poids de la religion et des traditions sur les femmes en particulier qui sont souvent mères dès 15 ans.
Le rêve américain est partout : désir d’ailleurs, de fortune, de vie meilleure… De très nombreux ouvriers agricoles partent faire les récoltes au Canada (où ils obtiennent plus facilement des visas) pour plusieurs mois voire plusieurs années, des familles se saignent pour envoyer leurs enfants à peine majeurs dans des conditions complètement illégales et aléatoires. C’est une réalité très dure.
Au fond du vallon, un pont suspendu permet de traverser la rivière. Je n’aime pas ça !! Mais bon, il y a suffisamment de végétation pour masquer l’impression de vide. Nous avalons quelques oranges cueillies à même l’arbre pour reprendre des forces : il va falloir remonter !

C’est raide, très raide, au milieu des caféiers où parents et enfants cueillent les précieux fruits rouges (jaunes parfois). Après il faut remonter les gros sacs à dos de cheval ou d’homme. Une caravane d’hommes chargés de plus de 50 kilos chacun nous double gaiement en commentant ces drôles de dames entre deux âges qui marchent juste pour le plaisir (un concept plutôt inconnu ici !)



Nous arrivons au village de Las Pilas (les lavoirs), les boissons fraîches de la tienda locale sont plus que bienvenues. Encore 15 minutes de marche avant de faire halte pour le déjeuner… nous sommes accompagnées par des jeunes filles qui rigolent sous cape et se laissent photographier avec les gringas. Des fillettes jouent en portant leur petit frère ou sœur dans le dos pendant que les mères s’activent à la lessive dans le lit de la rivière.


La dernière ligne droite vers le camp est une crapahute sur un sentier raide et glissant à peine marqué au milieu de la forêt. Mes mollets demandent grâce ! Juan Carlos et Patricio ont installé le camp au-dessus d’un village, à proximité du terrain de foot et d’une église évangélique (n’imaginez pas le joli petit clocher typique, ça ressemble plus à un hangar). Le site est magnifique, dégagé. Des jeunes garçons font rouler leur cerceau avec une branche tout en observant les gringas.
Lorsque les nuages se déchirent, la vue est incroyable : en face de nous les volcans Acatenango et Fuego. Nous avons bien mérité un petit apéritif : vin blanc (chilien) avec des fraises… c’est pas mal !
